Avignon 2024 : “Mothers, A song for Wartime”, chant d’amour et de paix pour l’Ukraine
Sous l’impulsion fantastique de l’artiste polonaise Marta Górnicka, des femmes ukrainiennes, biélorusses et polonaises se réunissent sur scène pour former un chœur vibrant, reprenant les témoignages de mères et d’enfants qui ont fui la guerre et les persécutions. Vingt et une femmes, âgée de 9 à 72 ans, sont les soldates royales au chant somptueux et antique : celui d’une guerre pour la paix, celui d’une guerre pour l’amour. Magnifique.
Chœur de femmes
Elle arrivent sur la scène de la Cour d’Honneur, chargées à bloc, guerrières du renouveau, messagères de la chtchedryka, cette chanson ukrainienne en forme de rituel ancien qui porte un voeu de renaissance et de prospérité. En short et baskets, en robe ou en caleçon de sport, le corps tonique et la musculature frémissante, les vingt et une femmes, jeunes filles, mères ou grand-mères, qui déboulent sur la scène toutes de bleu vêtues, ne sont pas venues pour pleurer ou se lamenter. Loin de chœur antique de femmes en noir, ces réfugiées venues d’Ukraine, de Biélorussie ou qui ont ouvert leurs maisons en Pologne, forment le cœur battant d’un message pétri d’espoir et de révolte. Marta Górnicka, debout au milieu du public, les dirige avec la précision d’un chef-d’orchestre. Les poèmes d’enfants, les chansons pop, les berceuses ukrainiennes, les extraits de Sophocle et d’Euripide, les témoignages individuels sont ici la matière d’un spectacle total, bouleversant, que ces femmes portent avec leur voix et avec leurs corps, chorégraphies dans des déplacement martiaux et doux à la fois.
Ode à la vie
Le travail musical, rythmique, qui fait résonner la puissance des voix pour défier la violence de la guerre, l’énergie des corps pour contrer les traumatismes des viols de femmes et d’enfants, est ici formidablement mené. De victimes, ces femmes en colère refusent le statut, pour devenir des protagonistes à part entière de cette guerre. En ligne militaire, mais aussi en cercles, debout ou assises, leur chant d’une beauté sublime – l’une des femmes était professeur de musique et de chant au Conservatoire- et leur énergie corporelle portent l’écho d’un peuple que les deux années de guerre ont fait disparaître des écrans médiatiques. L’habitude de la monstruosité qui vient de l’est de l’Europe vient parfois à endormir nos consciences. Ces femmes, d’une exceptionnelle vitalité, viennent nous réveiller et nous interpeller. Nos oreilles flambent, nos yeux s’illuminent, en même temps que les bombes continuent de dévaster l’Ukraine. Et dans une berceuse doucement ironique, le chœur de femmes en appelle à l’Europe, contrée lointaine et en même temps si proche, qui nous rappelle à notre impuissance. C’est bouleversant.
Hélène Kuttner
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